Carnet de route

Rencontre avec Quentin - 3/5

Le 24/03/2020 par MB

3ième "épisode" de cette rencontre avec Quentin...

Au sommaire:

  • L'entraînement, l'exigence de la montagne, l'engagement, la préparation...

 

L’entraînement, l’exigence de la montagne, l’engagement, la préparation…

L’entraînement, l’état d’esprit

« L’escalade c’est très complet… Seulement moi, en plus de mon niveau et de ma technique je dois travailler mon cœur et mes poumons, cardiaquement, énormément pour encaisser l’altitude, les sorties longues, les longues heures de marche… Alors je fais de la course à pieds, du VTT, de la natation, donc je fais un cumul de plein de sports, et ça, ça me plaît parce que moi, j’adore découvrir plein de sports et pratiquer plein de sports… Donc c’est un ensemble de choses… »

« L’alpinisme, c’est ma compétition de l’année… Mes 3 ou 4 semaines de montagne, c’est ma compétition de l’année… Je vais m’entraîner un an, comme j’ai pu m’entraîner un an pour le Mont Blanc ou pour d’autres sommets, et pendant un an, je vais travailler le cœur les avant- bras, je vais travailler les placements, les choses comme ça, et quand j’arriverai en montagne ce sera l’accomplissement… »

« J’adore les esprits d’endurance… Les esprits d’endurance c’est ma philosophie… J’aime savoir ce qui va se passer dans 5h, 10h, 20h d’efforts… C’est ça qui est palpitant, on ne sait pas ce qui se passera derrière, comment on va réagir et derrière les efforts y aura toujours ce moment où on ne sait pas comment on va gérer ce qui va se passer… »

Les imprévus

« L’appréhension de comment je vais réagir à 4000m sachant que je ne suis jamais allé à 4000m… les gens ne réagissent pas forcément pareil, j’aurais pu très bien péter un boulon, avoir le mal des montagnes, avoir une barrière à 4000m et presque tout le rêve aurait pu disparaître parce que simplement je ne suis pas capable de monter à plus de 4000m… C’est une chance que j’ai d’avoir pu monter là-haut avec une certaine facilité mais due à l’entraînement parce que j’ai fait des entraînements… Mais c’est pour ça que je me suis entraîné dur, parce que…  la montagne ça peut être dur à certains moments et c’est ça que je recherche… »

« Le manque d’oxygène… L’aspect silence autour… parce que des fois y a du monde mais on est face à nous-même, mais parfois il faut être face à ses réalités et savoir faire le bon choix… Mais parfois le bon choix… le choix qu’on va prendre ce n’est pas forcément le meilleur… Mais on l’a pris… Et faut s’y tenir… Il y a des choses, c’est assez rigoureux. »

Beaucoup de facteurs à prendre en compte mais aussi beaucoup de choses qu’il n’est pas toujours possible de prévoir :

  • La météo (elle peut changer rapidement ou ne pas être comme le bulletin météo prévisionnel)
  • La mauvaise neige, la neige qui fond
  • Le froid
  • Les chutes de séracs,
  • Le permafrost qui fond et entraîne des chutes de roches
  • Plus généralement les changements engendrés par le réchauffement climatique qui engendrent des phénomènes qui peuvent être dangereux

Bien sûr, on peut être prévoyant, tenter d’anticiper, s’être beaucoup entrainé pour aller vite, avoir un mental d’acier…mais il y a aura toujours une dose d’imprévu…

« Pour l’instant, je croise les doigts, je n’ai jamais eu de gros imprévus… Je n’ai jamais eu de grosses surprises, j’ai toujours réussi bien à préparer mes ascensions… »

La préparation

La préparation, c’est crucial : « je pense que c’est 50 à 70% de la réussite du sommet ».

Tout comme on prépare une rando et bien on prépare sa sortie alpinisme ! On lit les topos, on prépare le matériel en conséquence, matériel qui dépend aussi des conditions météos. De plus, vus les changements climatiques, des rochers sont tombés avec la fonte du permafrost, des glaciers ont fondu : « ça a changé l’histoire de la voie ; et forcément, c’est plus les mêmes coinceurs, c’est plus les mêmes choses – alors il faut forcément essayer de se tenir à la page et de se concentrer ». Et parfois il faut abandonner un projet à cause des conditions météos ou de l’évolution de la voie… « Cet été, je n’ai pas fait la traversée de la Meije, je n’ai pas fait certaines choses à cause de la météo. Mais je ne suis pas triste, c’est juste qu’il ne faut pas forcément se mettre en danger, il faut essayer de maîtriser un minimum les dangers et les risques, et après tu prends le pour et le contre. » Pas question en effet de passer à un endroit et à une heure où la neige est mauvaise, où les chutes de sérac ou de rocher sont nombreuses…

Par ailleurs il ne faut pas négliger le « facteur humain » - les personnes avec qui l’on part. Il s’agit de préparer la course et d’anticiper les choses mais ceci se fait en fonction des personnes avec qui l’on est ou que l’on emmène : il est donc important d’échanger avant. Le but c’est tout de même d’aller jusqu’au bout du projet !

La formation

La préparation passe aussi par la formation au préalable et la formation des personnes que l’on emmène, à qui on va transmettre un certain savoir : « un sport extrême l’alpinisme, on oublie le facteur âge – c’est celui qui a le plus de connaissances qui, au moment donné, donne l’information, et c’est sa voix qui prime ; (…) j’essaie de donner la connaissance aux gens pour qu’eux-mêmes transmettent. »

Et pouvoir faire vite, encore et toujours : gagner du temps à la montée pour pouvoir être redescendu avant les chutes de séracs, faire les manips rapidement, pouvoir anticiper ce qu’on va faire ensuite… « La vitesse, je sais qu’elle peut me faire gagner ma vie ! »

« Alors, quand je travaille mes manips, quand je travaille mes manips avec le pôle, j’ai dans la tête de savoir ce qui va se passer après, si j’ai bien sécurisé pour mon 2nd, ce qui va se passer quoi… On parle de l’imprévu mais quand on traverse une arête à pic, (…) si ton second, tombe à gauche et bien toi il faut que tu sautes à droite, pour équilibrer – et bien t’as pas le temps de penser, tu ne te dis pas : est-ce que je dois sauter ? Tu sautes même s’il y a un caillou, tu sautes et ça t’es content de le transmettre parce que si je suis encore à une personne et que je viens à tomber je serais content qu’elle me sauve la vie en sautant à l’opposé de moi. »

A suivre...







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