Carnet de route

My ascent of Mont Blanc
Le 30/12/2019 par Quentin Bourguignon
En juillet 2009, je venais de redescendre de mon premier glacier et j’étais si heureux d’atteindre les 3500 mètres d’altitude que je m’étais dit qu’il était possible de faire encore plus haut.
J’en ai donc directement parlé à Eric et Didier, mes mentors en alpinisme, qui m’ont dit :
- « Tu sais Quentin avoir fait ce glacier c’est super déjà mais si tu veux un jour faire le Mont Blanc il faudra que tu te prépares encore plus car ce sommet est encore plus dur et encore plus contraignant ».
Si nous prenons un peu de recul je pense que tout adulte dirait ça à un jeune de 10 ans.
Après cela, j’ai subi deux opérations au niveau de mes avant-bras qui m’ont demandé du repos pendant un certain temps. Cependant, je n’avais qu’une idée en tête, monter encore plus haut.
C’était mon nouvel objectif : L’ascension du Mont Blanc pour mes 20 ans.
Le projet est donc lancé. Il fallait que je continue à progresser par rapport à ma capacité physique, à mon niveau de grimpe, et par rapport à mon mental. Ce sont des éléments essentiels pour pouvoir préparer une telle ascension.
J’avais la motivation et j’avais envie de montrer aux autres que l’on peut se surpasser pour accomplir chacune de ses envies et pour réaliser nos rêves.
Il faut savoir que l’alpinisme est un sport difficile et exigeant allié à un état d’esprit et un engagement personnel. Ce sport difficile présente des risques, néanmoins la satisfaction d’arriver au sommet et l’admiration pour le paysage nous fait oublier ce paramètre.
La citation de Confucius dit vrai :
« Je pense que le bonheur ne se trouve pas au sommet de la montagne mais dans la façonde la gravir ».
Elle est valable pour l’alpinisme mais également pour notre façon de vivre chaque jour.
En pratiquant l’alpinisme, vous pouvez fixer et atteindre vos objectifs. Lorsque que vous avez réussi votre défi, vous pouvez être à la fois fier et heureux car c’est l’aboutissement de vos efforts et de vos préparations qui permettent de vous mener au sommet. Pour moi l’alpinisme est une façon de vivre, c’est une énorme source de motivation qui m’éveille et me donne chaque jour la volonté de faire des entrainements toujours plus durs et me permet d’affronter des obstacles de la vie.
Comment me suis-je préparé ?
Ma préparation a duré 9 mois (entre 2017 et 2018). C’est une préparation physique et mentale éprouvante.
Tout d’abord, j’ai continué à parcourir d’autres sommets en alpinisme avec Didier en pensant à chaque fois qu’un jour j’aurai le niveau pour partir à la conquête du Mont Blanc.
J’étais déterminé à réussir et à accomplir ce projet qui me tenait à cœur.
J’ai contacté un guide que j’avais rencontré quelques années plus tôt dans un camping à Chamonix. C’était la meilleure personne avec qui je pourrai partager ce projet. Il était vraiment intéressant et je sentais qu’il pouvait m’apporter énormément d’enrichissement durant cette ascension. Après quelques échanges par e-mail, on a pu donner une date pour effectuer l’ascension : Le 1er juillet 2018.Me voilà donc face à mon but et là je savais que je ne pouvais plus reculer.
Il en était convenu que je ne passerais pas le Mont Blanc par la voie classique mais par la voie des trois Monts, une voie magnifique mais plus difficile, plus longue donc plus exigeante et forcément avec un peu plus de danger. J’ai donc énormément étudié cette voie en l’apprenant au maximum que l’on puisse pour connaître chaque petit détail et chaque zone dangereuse.En comparaison, le grimpeur à l’escalade examine sa voie avant de la grimper, l’alpiniste aussi doit étudier les paramètres de son trajet à effectuer avant de commencer son ascension.
Au niveau de la préparation physique, j’ai continué la course à pied. Afin d’augmenter ma capacité pulmonaire, je courais avec un masque qui réduisait l’entrée d’air pour mimer les conditions de haute altitude.
Ensuite, 2 fois par semaine, j’allais à la piscine et je faisais des balades en VTT pour travailler l’endurance cardio-pulmonaire. Je faisais aussi de l’escalade et du renforcement musculaire.
J’ai également pratiqué une adaptation climatique, en dormant la fenêtre ouverte l’hiver. Cela permet à mon corps de s’adapter au froid des sommets. Je courais à 6h du matin pendant l’hiver afin de préparer mon corps à l’effort à basse température et de me préparer aux efforts matinaux.
Au niveau alimentaire, j’ai fait attention à mon alimentation, ce qui m’a permis de perdre un peu de poids.
La préparation mentale s’effectue sur la longueur de cette période de préparation. Il fallait tenir jusqu’au bout de chaque entrainement physique, ne pas lâcher son objectif pour que les bénéfices se ressentent.
Il faut savoir que je ne savais pas comment me préparer pour réaliser cet objectif. Je me suis documenté et j’ai essayé de travailler toutes les facettes importantes afin d’être prêt.
Avant l’ascension :
Une semaine avant l’ascension étaient prévues deux sorties pour m’acclimater à l’altitude et essayer de fabriquer un maximum de globules rouges pour être performant et également éviter le mal de la montagne.
Les deux sorties d’acclimatation se sont bien déroulées je me sentais de mieux en mieux en altitude. Mon corps réagissait bien. La pression montait de plus en plus à l’approche de la date.
La préparation terminée nous voilà en juin pour se diriger vers Chamonix. Je voyais la météo changer.Il faisait de plus en plus chaud et des isothermes à 5000 mètres étaient prévus quelques jours plus tard.
La pression commençait à monter en moi. J’avais peur de ne pas pouvoir faire l’ascension à cause des températures en hausse, cela me préoccupait grandement. Il faut savoir que la météo est un point clé pour la réalisation de l’ascension. Il faut donc se renseigner sur les conditions météorologiques ainsi que sur les conditions de neige sur le domaine où nous allons.
Le midi lors de ma dernière ascension nous étions de retour au refuge et mon guide m’a appelé pour me tenir informé des conditions météorologiques. J’appréhendais son appel téléphonique, l’idée d’une éventuelle annulation due aux conditions météorologiques. Et non, son appel était un vrai soulagement, on anticipe d’une journée pour profiter de meilleures conditions. J’étais excité !
Me voilà parti pour prendre le train du Montenvers. Le stress était présent car il fallait arriver absolument avant le dernier train de la journée.
J’ai réussi à avoir un train. Après quelques courses, j’ai rejoint le guide qui m’attendait au camping. On vérifie ensemble le matériel nécessaire à emmener pour l’ascension sans rien oublier. A ce moment-là, le guide était inquiet en apercevant mes cloques au niveau des deux talons. Il pensait que la douleur allait me faire abandonner la traversée. Je l’ai rassuré en lui expliquant que ce n’était pas douloureux et que j’étais prêt pour l’aventure qui nous attendait.
La concentration était maximale. J’ai eu le temps d’appeler mes parents et quelques amis pour les prévenir que je partais le lendemain. J’ai senti de loin le soutien et l’encouragement de mes proches. Ils me promettaient la réussite, car je voulais tellement cette montagne que j’arriverais au sommet dans deux jours.
Je n’arrivais pas à réaliser car je me disais que tout pouvait arriver, je n’avais jamais passé 4000 mètres d’altitude, je ne savais pas comment mon corps allait réagir à cette hauteur et je me demandais aussi si j’allais m’adapter aux conditions difficiles.
Croyez-moi on a beau lire beaucoup de livres, il faut le vivre pour savoir ce qu’est la haute montagne.
Après avoir diné, nous nous sommes dirigés vers notre tente pour dormir, même si je vous avoue que l’on n’a pas énormément envie d’aller dormir.
Le lendemain matin, le guide et moi partons en voiturepour passer par le tunnel du Mont Blanc et arriver du côté de l’Italie. Ensuite, nous avons pris le SkyWay, une remontée mécanique qui nous a emmenés à la pointe Helbronner à 3466 mètres d’altitude.
Il était 9H30 et nous nous sommes équipés pour faire la traversée de la vallée blanche et ainsi rejoindre le refuge des cosmiques pour que le lendemain nous puissions commencer l’ascension.
La traversée de la vallée blanche était prévue entre 2H30 et 3h de marche. Nous sommes arrivés au refuge au bout de 2h de marche.Tout allait bien. Nous nous sommes préparés dans nos chambres et avons profité de l’après-midi. Mon guide m’a conseillé d’aller me reposer car la nuit allait être courte. Je suis donc parti me reposer sans réussir à dormir.J’avais vraiment envie de partir tout de suite.
Imaginez que vous vous préparez pendant 9 mois, que vous donnez tout pour réussir ce projet seulement il faut encore attendre une journée. C’est une sensation de frustration mélangée à de l’excitation.
Finalement je me suis endormi. Seulement, je me suis réveillé avec un mal de tête. Avec l’altitude, le sang s’épaissit et a du mal à circuler, je le savais. Comme je venais de me détendre, mon cœur battait plus lentement et donc pompait moins vite, mon cerveau était irrigué moins rapidement et le mal de tête était présent. Pour enlever ce mal de tête, j’ai bu énormément d’eau et me suis mis à bouger, faire quelques pompes et monter les marches rapidement pour accélérer mon rythme cardiaque.
Au moment du repas je commence à aller mieux mais on s’approchait du moment où il fallait aller se coucher. Je redoutais un peu ce moment car je ne voulais pas me réveiller de nouveau avec un mal de tête. J’étais toujours autant impatient de partir.
J’étais donc parti me coucher dans mon dortoir vers 21h j’avais une super place dans mon lit, la tête près d’une fenêtre où un léger courant d’air me rafraichissait légèrement. Le dortoir était plein et je voyais des personnes vraiment mal à cause de l’altitude. Moi, j’allais bien.
Je suis parti me coucher et j’ai mis mon réveil à 0h50 car nous devions déjeuner à 1h du matin pour partir à 2h au plus tard du refuge. Toutes mes affaires étaient prêtes près du lit pour me préparer rapidement et gagner un maximum de temps. Ma nuit a été vraiment chaotique, je me suis endormi rapidement étonnamment et je me suis réveillé à 23h donc effectivement je n’ai pas dormi beaucoup. Je commençais à avoir mal à la tête. J’ai essayé de gérer ma respiration et d’accélérer mon rythme cardiaque et je me suis rendormi. Je pratiquais ces exercices toutes les 15 min environ pour éviter le mal de tête.
A 0h, des personnes de mon dortoir commençaient à se préparer et partaient. Je croyais qu’il était l’heure pour moi aussi de partir, mais non.
A 0H30, je regarde l’heure et me dit qu’il était temps de sortir du lit, de me préparer et attendre l’ouverture de la cafétéria pour prendre mon petit déjeuner.
Le Jour J, 1er juillet 2018 :
Je suis sorti du dortoir et descendu au rez-de-chaussée. Je devais bien protéger mes talons des frottements pour ne pas avoir mal pendant l’ascension.
Une fois fini, le réfectoire n’étant pas ouvert, je décide d’appeler mon père qui était en train de travailler de nuit dans son usine. Il m’a demandé comment ça allait, je lui ai répondu que tout allait bien, que je n’avais pas beaucoup dormi.La météo était plutôt bonne et j’étais prêt et motivé à 100 %. Il m’a donc dit de profiter et de me faire plaisir.
Le réfectoire a fini par ouvrir et je suis allé récupérer un plateau pour mon guide et moi-même, et j’ai commencé à déjeuner. Quand mon guide m’a vu dans le réfectoire il était surpris que je sois prêt de sitôt. Je lui ai dit que je me sentais super bien et que j’étais prêt et motivé. On a donc partagé notre petit déjeuner calmement. Je me rappelle avoir bien mangé pour prendre des forces.
Le déjeuner terminé, il était temps de se chausser, de sortir dehors, mettre ses crampons, prendre son piolet, s’encorder et c’était parti pour réaliser ce rêve, mon rêve. Quand j’ai franchi la porte du refuge pour sortir, je me souviens avoir regardé les personnes, toutes équipées de lampes frontales, présentes dehors. Tout le monde marchait et se dirigeait vers le premier Mont. Crampons fixés aux pieds, j’ai rejoint mon guide. Il fallait s’encorder et nous étions prêts à partir.
Une fois encordés, il était temps d’échanger quelques mots. Mon guide m’a alors rappelé qu’il nous faudrait environ 2h à 2h 30 pour chaque mont et qu’il fallait essayer de rattraper et de doubler quelques cordées pour éviter d’avoir trop de monde au-dessus de nous dans les monts. Cela permet d’éviter les risques de chute de glace.
On a donc commencé à descendre une grande pente de neige pour descendre sur le glacier du bas. Une fois arrivés en bas, nous étions en file indienne avec les personnes cordées qui étaient devant, mon guide m’a alors demandé si nous pouvions accélérer pour dépasser un maximum de cordées avant d’attaquer le premier Mont. Pour moi, physiquement, tout allait bien j’étais en pleine digestion mais j’avais travaillé sur les efforts en digestion et j’étais en sous régime, j’ai donc accepté qu’on accélérait. Après avoir dépassé plusieurs cordées, nous avons attaqué le premier Mont nommé le Tacul. Nous avions plus qu’une dizaine de cordées devant nous. Nous avançons d’un pas rythmé mais tout allait bien.
Nous arrivions à une grosse rimaye. Une rimaye est un dénivelé de glace représentant une crevasse. Pour passer cette partie délicate, une échelle était en place. Il y avait un peu d’attente mais il ne restait plus qu’une personne à dépasser.
Après le passage de l’échelle, nous voyons les cordées qui montaient en lacet pour faciliter l’ascension. On s’est donc regardé avec mon guide et on s’est dit que tout allait bien, nous avons donc pris la décision de monter tout droit en tirant vers la droite dès le départ. Il fallait alors faire de nouvelles traces. Ce jour-là, la neige était bonne et solide, cela tenait bien. On a donc suivi nos traces et on est arrivés au sommet de ce premier Mont. Mon guide a alors regardé sa montre et m’a dit qu’on était largement dans les temps. Nous avions gravi le premier mont en 1h30. J’étais content, je profitais, j’avais un beau paysage et le fait d’être en avance peut toujours être bon signe en montagne. Je lui ai donc dit qu’il fallait qu’on continue sans se refroidir car nous étions déjà à 4100 mètres et il faisait -4°C.
- Place au deuxième mont : le Maudit.
On a retrouvé, au loin, trois cordées partis du refuge à 0h qui grimpaient le mont Maudit. Il fallait qu’on fasse une traversée pour rejoindre le bas de la paroi et passer en dessous des blocs de glace appelés séracs. C’est un passage assez dangereux car à tout moment un sérac peut se décrocher et nous tomber dessus. Nous nous engageons dans la voie qui montait, tout en contournant les séracs. La montée était un peu plus difficile que celle du Tacul car la pente était plus importante.Tout se passait très bien, on montait toujours avec le même rythme. Nous avions une belle vue pendant la montée, silencieux, nous étions concentrés sur notre respiration et sur chacun de nos mouvements.
On pouvait admirer les étoiles et en contre bas la ville de Chamonix éclairée. Nous arrivons alors à 150 mètres en dessous du sommet, et nous avons presque rattrapé une des trois cordées qui était devant nous. Mon guide m’a alors fait monter à son niveau et m’a dit : « Quentin je vais lâcher toute la corde entre nous, tu vas m’assurer, je pars, j’équipe la voie et dès que la corde se tend, tu pars et moi une fois arrivé en haut je t’assure ». Je lui ai donc dit qu’il n’y avait pas de problème c’était la partie la plus complexe de l’ascension et je le savais. Il y avait une pente gelée entre 45 et 50 degrés et des cordes fixes pour nous aider à monter.
Le guide s’élance en premier, je l’assurais tout en gardant un œil sur Chamonix en contre bas qui était magnifique avec ces couleurs dans la nuit. Il n’avançait pas très rapidement du fait qu’il restait une personne cordée au-dessus de lui sur la voie. Il fallait qu’il la contourne légèrement pour pouvoir passer. Pendant ce temps je me refroidissais, la température était descendue et le manque de mobilité ne permettait pas de me réchauffer.
A ce moment-là, vous pouvez vous poser des questions et vous distraire, cependant il faut rester concentré sur son objectif, faire le vide de toutes pensées dans sa tête, ne pas laisser les émotions nous envahir et rester focalisés sur nos mouvements. Il faut assurer la sécurité de son guide ainsi que la nôtre.
La corde a commencé à se tendre, c’était le signal. J’ai repris mon piolet dans ma main et je suis parti. Après m’être placé, le guide était arrivé au sommet. J’ai alors levé la tête, ma lampe frontale éclairait le sommet. Je voyais la corde en haut, la pente de glace que j’allais devoir gravir. Je me sentais super bien et je ne sais pas pourquoi mais je suis parti en courant dans cette voie de glace en tapant la pointe des pieds pour rentrer les pointes situées à l’avant de mes crampons dans la glace. J’ai alors rattrapé rapidement la personne qui était encore dans la paroi je lui ai laissé les cordes fixes et je l’ai contourné par la gauche.
Quand je suis arrivé à sa hauteur, la personne m’a souhaité bon courage. Voici le bon côté de cette aventure, tout le monde se soutient.
Le sommet se rapprochait de moi et les 4300 mètres du Mont Maudit allait être à moi. Mon guide a penché la tête et m’a vu arriver.Il m’a crié : « Quentin c’est toi ? »,je lui répondis : « Oui c’est moi tu peux ravaler la corde j’arrive ». Arrivé à sa hauteur, il était en train de lover (enrouler)la corde à grande vitesse. Il m’a regardé et m’a dit : « Mais tu es un vrai TGV », il regarde sa montre et me dit : « On a mis 2h45 pour les deux Monts mais c’est hyper rapide. A cette allure on va être au sommet dans 1H15 ».
Je ne réalisais pas vraiment que c’était une performance.Tout ce que je peux vous dire c’est que tout allait bien pour moi je ne sentais pas de réelle difficulté à respirer ou de douleur physique. J’avais devant moi une vue magnifique, le Sommet du Mont Blanc qui était en train de se dessiner avec la lune en arrière-plan.
Là on peut dire que je n’avais jamais été aussi prêt de concrétiser mon rêve et je savais que vu ce que je venais de faire, j’arriverai au sommet qu’importe le temps que je mettrai.
Maintenant nous devions marcher encore le long du Mont Maudit en descendant légèrement jusqu’à atteindre le bas du sommet, pour enfin gravir le dernier Mont. Arrivé sur une zone plate, le jour commençait à se lever.La température descendait encore. Nous avons eu des bourrasques de vent violent car le vent s’engouffrait entre les deux montagnes et nous refroidissait encore plus. Le vent était prévu, on le savait avant de partir et les vents au-dessus de 50 km/h peuvent compromettre l’ascension car la température se refroidit énormément. Nous avons donc fait une pause pour nous vêtir d’une couche de vêtement supplémentaire car la température en ressenti était autour des -15°C. J’ai également changé de gants pour en mettre des plus chauds. Une fois l’arrêt effectué, nous avons repris notre marche, la tête dans la capuche et on s’est dirigé vers la pente qui allait nous mener au sommet.
Là je pouvais me rendre compte de la difficulté de la haute montagne avec sa température, ses vents violents, on est vraiment face à nous-mêmes. La montée se passait bien, on m’avait dit que lorsque je passerais la barre des 4000 mètres d’altitude, je ressentirais un manque d’oxygène et j’avancerais beaucoup moins vite. Au sujet des derniers 400 mètres, on m’a dit que je reprendrais mon souffle tous les 2 pas.
- L’ascension vers le sommet :
Pendant la montée, je n’ai pas ressenti de difficulté respiratoire, je me sentais bien et je m’approchais de plus en plus du sommet. J’étais à quelques pas de mon guide, nous luttions contre les rafales de vent. Les rafales soulevaient la neige et la glace en plein dans le visage, le froid nous brûlait légèrement les joues. Un moment mon guide s’est retourné vers moi et m’a demandé de quel couleur était son nez. Son nez était rouge et il était en train de geler. Je lui ai alors proposé un deuxième tour de cou que j’avais emmené, pour qu’il se réchauffe. Nous avions rattrapé toutes les cordées qui étaient parties en même temps que nous, ainsi que celles parties à minuit.Il n’y avait donc plus que nous deux à quelques pas du sommet.
Nous voilà alors arrivés au Sommet du Mont Blanc (4810m). Nous étions seulement tous les deux pendant 5 min.On a pu voir le magnifique lever de soleil, ce qui n’était pas prévu. Nous avons immortalisé ce moment par quelques photos avant de poursuivre.
Après avoir géré l’émotion d’avoir atteint mon objectif tant attendu, il était temps de redescendre car vous imaginez que vu les vents et la température nous ne sommes pas restés très longtemps là-haut.
Nous avions donc mis 4h pour faire l’ascension du Mont Blanc. Je devais appeler ma mère, quand j’arrivais au sommet et si les conditions météorologiques me le permettaient. Au vu de l’intensité des bourrasques je n’ai pas pu la contacter.
Nous avons donc entamé la descente par la même voie. Il fallait alors rester concentré pendant toute la descente.Je voyais toutes les personnes qui se dirigeaient vers le sommet, certaines étaient vraiment en difficulté. Je me sentais chanceux de ne pas avoir eu de problème. Nous voilà arrivés en Haut du Maudit près à attaquer la descente. Mon guide m’a alors descendu en me moulinant le long de la paroi. Je me suis attaché à la paroi en attendant que le guide me rejoigne pour faire un deuxième rappel. Une fois qu’il m’a rejoint on a préparé la deuxième descente. Mon guide m’a alors descendu dans une crevasse et il fallait que je remonte une légère pente pour en sortir. Une fois ce passage passé, mon guide est descendu en rappel. On est ensuite repartis pour attaquer la fin de la descente du Mont Maudit.Une fois sortit de la zone dangereuse avec les séracs, nous nous sommes arrêtés quelques instants pour manger pour la première fois depuis le petit déjeuner. Je n’avais pas réussi à manger pendant l’ascension avec le froid et l’eau avait gelé.
Après cette courte pause, nous avons repris le chemin pour attaquer la dernière descente : celle du Tacul. A la fin de cette descente il nous restait plus qu’à traverser la vallée blanche, reprendre le téléphérique et récupérer la voiture du côté italien.
Avant de traverser la vallée blanche pour rentrer, on a fait de nouveau une pause pour manger un bout et j’en ai profité pour appeler ma mère. Il était alors 9H du matin et quand je l’ai eue elle m’a demandé avec impatience :« Ça y est tu es au sommet ? Didier m’a dit que tu devais approcher du sommet vu l’heure ». Je lui ai alors dit que c’était fini. Elle a eu peur que je n’aie pas pu arriver au sommet. Je lui ai raconté que j’étais au sommet à 6h du matin et que là on avait déjà tout redescendu. Elle ne me croyait pas. Je lui ai dit de prévenir nos proches caron allait finir la traversée.
Le téléphone remit dans le sac, nous étions repartis pour finir cette traversée et rentrer au camping. Arrivés dans le téléphérique pour redescendre, mon guide m’a fait un compte rendu de notre ascension. Il a aimé partager cette ascension avec moi, il a eu l’impression de partir avec un autre guide car j’avais un bon rythme de marche par rapport à l’altitude et que je maîtrisais bien les techniques de corde. Il m’a également dit que j’avais vu ce qu’étais la haute montagne avec ces dangers.
J’étais content qu’il me fasse ce compte rendu et j’étais aussi heureux d’avoir réalisé cette préparation tout au long de l’année pour permettre de faire cette ascension. J’ai eu le plaisir de pouvoir gravir la montagne jusqu’au sommet sans souffrir. Ce projet restera gravé dans ma mémoire.
- Le retour :
Sur la route du retour en revenant au camping, on a regardé la voie que nous venions de faire et d’un coup nous nous sommes garés sur le bas-côté.Nous venions de voir que la voie dans le Mont Maudit avait subi un changement. Nous avons pris les jumelles et nous avons remarqué une énorme coulée de glace. Nous étions 3h avant dans la paroi au moment de la descente et 3h après il venait d’y avoir une énorme chute de sérac qui avait complètement modifiée la voie des 3 Monts. C’est lorsque vous voyez ces changements que vous prenez encore plus conscience que vous ne pouvez pas vous opposer à la puissance de la montagne, c’est elle qui décide.
Arrivés au camping à 12h nous avons mangé un petit peu. Quand j’ai ouvert mon téléphone à ce moment-là, j’avais des dizaines de message me félicitant de mon ascension. Les messages faisaient chaud au cœur, pour moi j’avais réussi cette ascension mais surtout j’avais partagé ce projet avec énormément de personnes qui étaient importantes pour moi. J’ai passé une bonne partie de mon après-midi à répondre aux messages ou même au téléphone. C’est vraiment un plaisir de pouvoir dire qu’on a atteint notre objectif.
Je vous promets que quand vous regardez la montagne que vous venez de gravir vous la voyez d’un autre œil.
Pour finir sur ce projet, cette ascension m’a apporté énormément de choses dans ma vie. J’ai réalisé que j’étais capable de mener à terme un objectif du début à la fin. Il a également consolidé mon envie et ma passion pour la montagne. Il m’a permis de prendre confiance en moi dans mon sport de passer au-dessus de mes opérations et me donner un nouveau départ. J’ai également aimé partager cette expérience avec toutes les personnes importantes à mes yeux, qui ont toujours cru en moi dans les moments les plus durs de ma vie.
Je souhaite remercier les personnes qui ont permis la concrétisation de ce projet.
Tout d’abord merci à mes parents qui m’ont toujours soutenu dans mes choix et m’ont toujours permis d’accomplir mes plus grands rêves.
Je remercie encore toutes les personnes, qui ont été derrière moi dans ce projet et qui me permettent d’évoluer chaque jour vers mes nouveaux horizons et mes nouveaux défis.
Merci à ma sœur pour son aide et sa confiance en moi. Merci à mon beau-frère pour ses précieux conseils dans ce sport me permettant de progresser et d’atteindre mon niveau actuel.
Merci à Didier ROCHET pour son implication dans ce projet et pour mon acclimatation avant l’ascension de ce sommet.
Merci à Éric MULLER pour m’avoir fait découvrir l’alpinisme et m’avoir permis de réaliser l’ascension de mon premier sommet en 2009 à l’âge de 10 ans.
Merci à tous ceux qui ont intervenu, pour leur soutien et leurs conseils tout au long de ma préparation.
Merci à Maëva pour avoir pris le temps de relire et de corriger ce document et qui lui a donné un sens en organisant mes idées de manière structurée.
Je remercie pour finir les différentes professions du corps médical qui m’ont permis d’être prêt physiquement pour cette ascension (étiopathes, kinésithérapeutes, médecins du sport).
Ma famille, mes amis sont une source d’énergie constante et de dépassement de soi.Ils me font évoluer à chaque instant de ma vie et ce sont eux les vrais héros de ma réussite.
Je remercie énormément mon guide de m’avoir emmené et j’ai vraiment passé deux jours extraordinaires avec lui. Il m’a également appris énormément de choses concernant la montagne.
Il y a également une chose pour laquelle je suis fier d’avoir réussi cette ascension cette année-là car mon grand-père a pu savoir avant son décès que j’avais réussi ce projet si important pour moi.
Je dirais maintenant que si vous avez des rêves, n’attendez pas pour les réaliser faites-vous plaisir dans vos domaines et profitez de votre famille ainsi que vos amis.
Une citation de Xavier Dolan m’inspire énormément autant dans ma vie personnelle, que professionnelle ou sportive est : « Je pense que tout est possible à qui rêve, ose, travaille et n’abandonne jamais ! ».
Depuis cette ascension j’ai continué mon chemin, j’ai intégré le pôle espoir d’alpinisme de Normandie qui me permet de me perfectionner dans les disciplines de l’alpinisme et d’en découvrir de nouvelles.
Ce projet a été l’achèvement des 20 premières années de ma vie, hâte de vous faire vivre mes prochains défis en montagne…